BD

« George Sand, fille du siècle », Séverine Vidal et Kim Consigny, Delcourt/ Encrages, 2021 


Un album extrêmement complet pour le lecteur avide de dépasser la légende et de découvrir cette auteure et cette femme incroyable.

Il s’agit donc d’un biopic très documenté qui déroule la pleine existence d’Aurore Dupin et la conduit de l’enfance à la mort. Le récit accorde une large place aux affaires de famille, au mariage de ses parents qui constituait une terrible mésalliance aux yeux de sa grand-mère paternelle, qui finira par l’arracher en partie à sa mère et par l’élever entre Nohant et Paris après le décès prématuré de son père. 

C’est donc dans une atmosphère d’ancien régime qu’elle achève de grandir aux côtés d’une aïeule austère et pleine de préjugés qui nourrit une véritable haine pour sa mère, Sophie. Elle écrit des lettres pour lutter contre l’ennui des cours de graphie, des fictions pour oublier les leçons pénibles et passer le temps. Elle se plait ainsi à transfigurer les paysages et les êtres, de plus en plus consciente des problèmes sociaux.

 » J’ai sans cesse un roman dans ma cervelle ! Il me faut un monde de fiction que je porte avec moi, partout… »1815

 » J’ai la poésie pour condition d’existence. »

Mais l’enfance est aussi le temps des jeux dans la campagne, du plaisir de l’équitation et du couvent. 

Nous la découvrons ensuite femme. Si elle semble accepter les codes sociaux en devenant l’épouse de Casimir Dudevant, puis la mère de leurs enfants, elle se distingue surtout par sa volonté d’échapper à l’ennui du mariage, son désir farouche de vivre libre et de faire de la littérature son métier. Plus que tout, elle aspire à une vie d’espérances, de risques et de bonheur. Passionnée, elle mène ses amours à sa guise, passant des bras de Jules Sandeau à ceux de Musset, de Chopin, de Marie Dorval ou de Manceau. Un tantinet provocatrice, celle que l’on surnomme rapidement la don juan femelle, plaque tout et finit par obtenir la liquidation de son mariage. 

 » Le mari tue moralement la femme qui porte son nom »

Elle adopte la redingote, la cravate, le pantalon et le tabac. Adieu les corsets et le doux prénom d’Aurore, vive George ! C’est aussi le temps des premiers succès avec la publication d’Indiana. La France découvre qu’une femme se cache derrière ce pseudonyme. Certains l’adulent et la considèrent comme le drapeau de ralliement de toutes les femmes se piquant de savoir et de littérature, mais les caricatures et les quolibets se multiplientsans qu’elle se laisse atteindre.


 » Une femme qui aligne les obscénités ? Ça se vendra! Au kilo, comme le fumier ! « 

Forçat de l’écriture, elle fréquente des salons mondains et tout le gratin artistique de l’époque, sans pour autant se couper de la rue et d’une vie publique plus politique. Socialiste ou communiste, son engagement est sans faille alors qu’elle rêve d’égalité, de liberté et d’une Europe fraternelle. 

 » L’humanité n’est pas un vain mot »


L’album se lit ainsi également comme une reconstitution dynamique de toute cette période troublée de l’histoire de France qui alimente amplement son œuvre romanesque ou dramatique. 

C’est évidemment un bel hommage rendu à l’auteure, mais aussi un beau portrait de femme, une belle leçon de liberté et de détermination. A l’image de cette existence intense, le scénario est très rythmé et évite globalement tout didactisme. J’ai cependant regretté le format retenu qui tasse les planches et donne une impression de surcharge qui gêne un peu la lecture. Le graphisme ne m’a pas pleinement conquise. Le dessin m’a semblé inégal. Les paysages et les lieux sont bien rendus, j’ai moins aimé les visages. J’aurais également apprécié une mise en couleurs plutôt que ce choix du noir et blanc qui ne se justifie pas forcément.

Lecture effectuée dans le cadre de

hébergée cette semaine chez Stephie

17 réflexions au sujet de “« George Sand, fille du siècle », Séverine Vidal et Kim Consigny, Delcourt/ Encrages, 2021 ”

  1. J’ai l’autre BD sortie plus ou moins en même temps si je ne me trompe pas. Je commencerais donc pas celle-ci, mais celle que tu présentes m’attire également 🙂

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