BD

« Basquiat, l’enfant rayonnant », Paolo Parisi, Chêne, 2018




Avec cet album, Paolo Parisi nous propose un biopic de Jean-Michel Basquiat, qui s’intéresse tout autant à l’homme qu’à artiste.

Construit essentiellement sur le mode de l’analepse, le scénario s’ouvre sur le décès par overdose de l’artiste en 1988. De l’homme, nous découvrons la naissance en 1960 dans une famille d’immigrés relativement aisée enfance, puis l’enfance agréable d’un garçon précoce qui baignait dans la culture, fréquentait les musées, lisait beaucoup et dessinait sans cesse, notamment depuis que sa mère lui avait offert un livre d’anatomie, le Gray’s Anatomy, alors qu’il était hospitalisé suite à un accident, un livre qui ne le quittera plus. Le récit évoque ensuite ses blessures, conséquences d’un divorce houleux qui l’éloigne de sa mère devenue dépressive et de relations progressivement conflictuelles avec son père. L’enfant sage sèche les cours pour hanter Central Park et le West Village et finit par fuir la maison paternelle pour découvrir le monde de la rue, l’art du tag clandestin avec son copain Al, les ambiances nocturnes du Mudd, et les stupéfiants, une addiction qui nuira fortement à sa vie amoureuse avec Suzanne Mallouk. 

Il mène alors l’existence d’un bohème qui se rêve artiste, avant d’espérer devenir une star…Ses débuts ont des airs de duo. Il brave les interdits et impose la signature d’un énigmatique SAMO, avec son comparse.

Tous ces éléments, liés à l’intime, sont adroitement reliés au récit du parcours de l’artiste et son esthétique. On comprend mieux comment son travail relève de la pure improvisation, on perçoit la passion et la violence qu’il met dans ses toiles, ainsi que son analyse minutieuse et instinctive de la société et la rage qu’il déploie pour s’immuniser contre la souffrance, sans forcément y parvenir. On comprend mieux aussi pourquoi, pris de vertige dans cet univers qui le consume trop, déçu par l’avidité des galeristes et leur souci de productivité, attristé par la mort de Warhol et malheureux que son père refuse toujours de lui répondre, il se réfugie en vain à Maui…

Pour éviter le danger du biopic trop statique et trop didactique, Paolo Parisi recourt par ailleurs à un récit choral, alternant la voix de Basquiat lui-même, avec celles de Mary Boone, Bischofberger et Annina Nosei, par exemple, autant de témoins et d’acteurs de son ascension. Chacun contribue ainsi à retracer son passage de la rue aux galeries et aux expositions qui sont autant de consécrations pour celui que l’on nommera rapidement « The radiant child », en référence au titre d’un article publié dans le magazine Artforum en 1981. Nous le retrouvons ainsi aux côtés de Keith Haring, Diego Cortez, Emilio Mazzoli ou encore Andy Warhol, qui entretient des rapports pour le moins ambigus avec lui. 

Le tout constitue un album haut en couleurs fort documenté, dynamique et sensible, qui mérite le détour.

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