Il est des romans qui nous ravissent et qui nous habitent, ceux de Léonor de Recondo sont de cette trempe. Après une belle évocation de Michel Ange, un récit poignant sur les réfugiés espagnols et les amours saphiques, l’auteure s’attaque cette fois, de belle manière, à la question du genre.
Tout commence un soir sur un parking de supermarché d’une ville de Province. Une nouvelle fois Mathilda « se dépouille de ses habits de lumière » et se démaquille méticuleusement. « Elle se sent belle et triste ». C’est comme si elle devait s’effacer chaque fois, renoncer à elle-même avant d’enfiler sa tenue de sport. Lorsqu’elle redevient Laurent, l’habitacle de sa voiture est « un chaos, à l’image de son désordre intérieur », et sa vie est un déchirement. Il faut désormais se concentrer et rentrer à la maison, retrouver Solange et leurs deux ados, Thomas et Claire.
Sa vie se partage entre son emploi dans une société d’éoliennes, ses conversations avec sa collègue Estelle dont il admire la féminité, sa femme qu’il a rencontrée au lycée et qui a toujours pris l’initiative, ses entraînements de cyclisme, et le Zanzibar où Cynthia l’encourage à de venir enfin elle-même.
Cette différence qui lui pèse, qui s’impose à lui comme un tiraillement de plus en plus insupportable, il l’a toujours sentie. Il se souvient du plaisir qu’il ressentait, enfant, lorsqu’il fouillait dans les tiroirs à lingerie de sa mère, touchait les sous-vêtements de soie… Longtemps ensuite il s’est contenté de ceux de sa femme avant que Mathilda ne s’impose à lui, à son corps.
« Un jour, il faudra que je me ressemble. »
Il ignore comment l’avouer. Les réactions de ses proches l’angoissent, mais il sait qu’il ne pourra pas échapper à lui-même, qu’il lui faudra trouver cette adéquation entre l’intérieur et l’extérieur. Etre femme ne signifie pas pour lui renoncer à ce qu’il a construit en tant qu’homme, ni à sa famille. Mais il est possible que l’amour ne suffise pas
« Si je ne me suis jamais senti un homme, je me suis toujours senti père. »
« J’ai longtemps cru qu’être père me suffirait pour rester homme. »
Léonor de Recondo traite du sujet sans langue de bois, sans provocation non plus. Avec sobriété, elle accorde autant d’importance au parcours de Laurent qu’aux réactions de ses proches. Ses analyses psychologiques me semblent incroyablement justes et sensibles. Elle nous offre un roman finalement optimiste, un récit qui laisse la place à la compréhension. Sa langue, précise au possible, lui permet de sonder les âmes et les cœurs avec une belle humanité, sans jamais en faire trop. Cette finesse, qui lui est coutumière, fait aussi la part belle aux corps et fait de ce récit un roman résolument moderne.
Sa doit être un beau roman moi j’aime bien des romans ou il y a toujours un peut d’action
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Je comprends, mais on ne s’ennuie pas avec celui-ci non plus.
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J’avais été tellement déçue par Pietra viva (au point que lorsque nous avons parlé d’elle, je ne me souvenais même plus avoir lu un de ces romans ! ) que je n’ai pas envie, pour l’instant, de retenter cet auteur malgré ton excellent billet .
( https://joecouvelaire.wordpress.com/2016/04/25/pietra-viva-leonor-de-recondo/ )
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Je me souviens effectivement ! Mais son écriture gagne en maturité …
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Alors, à suivre …
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