« Le Havre », de Aki Kaurismaki, 2011

Après de longues semaines de silence, voici le retour de la rubrique ciné. Une fois n’est pas coutume, je vous propose un détour par un film finlandais empreint d’une grande humanité.

Ex-écrivain bohême reconverti en cireur de chaussures, Marcel Marx mène une vie d’exilé dans un quartier populaire du Havre. Il hante la gare, le bistrot de Claire et la modeste demeure d’Arletty et de leur chienne. Il déambule dans ce périmètre aux côtés de Chang, qui n’a de chinois que son passeport.
Son horizon s’élargit cependant lorsqu’il croise Idrissa ( Blondin Miguel), un jeune clandestin noir recherché par la police depuis qu’on a découvert une vingtaine de réfugiés dans un containeur sur le port. Il retrouve alors son sens de l’engagement d’antan et son désir de lutter contre l’indifférence humaine, aidé par une grande partie du quartier, tandis que certains cèdent à la délation.
Vous l’aurez compris, Kaurismaki nous propose ainsi, avec une grande sobriété, sa vision sur cette question épineuse des réfugiés et nous offre, à travers cette fable, un hommage à des valeurs en perdition comme la solidarité et un sens aigu de la liberté. Ses personnages, tous en marge, se distinguent par une forte dignité humaine. Ils évoluent dans une atmosphère quelque peu décalée, proche parfois de l’absurde, superbement servie par la photographie de Timo Salminen et les décors de Wouter Zoon. Ce long métrage, sensible, mais pas mélodramatique du tout, n’hésite pas à mêler humour et poésie tant dans les dialogues que dans les situations.
Le casting ne laisse rien au hasard non plus. André Wilms (Monsieur Lequesnoy dans La vie est un long fleuve tranquille) incarne un Marcel à la fois subtil, attendrissant et convaincant. Jean-Pierre Darroussin, fidèle à lui même, donne beaucoup de poids au commissaire Monet, tandis que Kati Outinen joue une Arletty touchante et vraie.
Un film à voir, si ce n’est déjà fait !