Cinéma étranger, Films cultes

« Oedipe-Roi », Pier Pasolini, 1967


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La biographie de Pier Pasolini expliquerait peut-être que ce grand réalisateur se soit intéressé au mythe d’Oedipe, mais ce n’est sans doute pas là l’important. L’essentiel réside surtout dans la façon dont il revisite le mythe en 1967, soit près de 25 siècles après Sophocle et en souligne l’intemporalité et l’universalité.

Si la majeure partie du film se déroule dans une Antiquité reconstituée et des décors qui font un peu sourire aujourd’hui, le récit cadre se situe dans une époque beaucoup plus contemporaine, vraisemblablement l’Italie des années 20 puis 60. Le réalisateur place ainsi son œuvre sous le double sceau de la tragédie et de la psychanalyse. Un jeune militaire, nouvellement père, éprouve une jalousie manifeste pour son fils qui semble lui voler l’amour de sa mère. Les pulsions infanticides se profilent et permettent à la caméra de traverser les espaces et les temps et de nous transporter sur une terre grecque aride, inhospitalière et parfois barbare.

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La narration suit alors toutes les étapes bien connues du mythe sur un rythme volontairement lent et lancinant: l’enfance à Corinthe auprès de Polybe et Mérope, les rumeurs, la consultation de l’oracle à Delphes, le parricide au hasard d’un chemin, la victoire contre la Sphinx, l’accès au trône et les noces avec Jocaste, la peste et l’effroyable révélation, la malédiction familiale.

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Plus que sur ces événements, c’est sur le cheminement tragique et une certaine forme d’errance qu’insiste Pasolini. Il en propose un traitement poétique et inventif qui cherche à renouer avec l’essence de la tragédie antique. Il revisite ainsi le chœur et ses fonctions avec beaucoup d’ingéniosité, insérant dans le récit des chorégraphies surprenantes sur une musique souvent à la limite de l’audible. Percussions et flûte scandent ainsi le récit. Les costumes de Danilo Donati, et surtout les masques, opèrent comme un clin d’œil au théâtre antique. Il en va de même avec le maquillage très clair qui rappelle les masques clairs portés par les acteurs lorsqu’ils incarnaient des femmes. Le jeu des acteurs, en revanche, est peu convaincant, pour ne pas dire pénible. L’amateurisme de Franco Citti, difficilement supportable, donne au héros tragique des allures de benêt ridicule; Julian Beck, alias Tirésias, n’est guère plus performant. Quant à Sylvana Mangano (Jocaste), elle a connu des jours meilleurs. Peut-être le film a-t-il mal vieilli de ce point de vue là. Il mérite cependant le détour pour sa réécriture et ses partis-pris esthétiques.

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