« Pablo, T 1, Max Jacob » de Birmant et Oubrerie, Dargaud, 2012
Scénario et dessin: Julie Birmant et Clément Oubrerie
Couleur Sandra Desmazières
« Pablo » est une quadrilogie qui a pour cadre le Paris du début du XX°, et plus particulièrement Montmartre, le quartier des artistes. Pablo, qui n’est pas encore Picasso, vient de débarquer en terre française. Il n’a que 20 ans et mène une vie sans le sou mais riche de rencontres déterminantes, dont celle du poète Max Jacob et de Fernande Olivier (Amélie Lang), modèle de nombreux peintres au Bateau-Lavoir.
Ce premier opus s’ouvre sur les souvenirs de la dite Fernande tandis qu’elle déambule, âgée, autour du Sacré-Cœur. Elle se souvient combien « la jeunesse à Montmartre en 1900, c’était la cruauté, la violence, la folie » même si on y « inventait l’art moderne ». Il faut dire que le quartier avait moins bonne presse à l’époque qu’aujourd’hui.
Amélie Lang, alias Fernande, est un destin. Elle fut élevée par un oncle et une tante, des petits bourgeois peu aimants qui dilapidèrent le pécule censé pourvoir à ses études. Pour eux, elle n’était qu’une vulgaire sang-mêlée dont ils furent heureux de se débarrasser en la mariant à Paul Percheron, un être vulgaire et violent. Harassée par ce mariage catastrophique, elle trouve un jour la force de s’échapper en empruntant les bottes de son affreux mari. Mais ce sont presque les bottes de sept lieues tant elles vont lui permettre de se construire peu à peu un nom, un personnage, une destinée. Son orientalisme va plaire aux artistes, à commencer par le sculpteur Debienne, qui lui offre le gîte et le couvert contre quelques heures de pose. Il sera aussi le premier de ses amants artistes…
Elle eut ainsi l’occasion de connaître Pablo et de participer à l’aventure Picasso.
C’est l’exposition universelle qui a conduit Pablo et son ami Carles en France, et il est de suite conquis, « on était à des années lumière de l’Espagne austère et pudibonde ». Une fois installé au 49 rue Gabrielle, il s’efforce de se faire son trou grâce à Manach, un agent intéressé, et à Berthe Weill, une marchande d’art à qui « on ne la fait pas ». L’atelier devient par ailleurs « un haut lieu de débauche et de création ». Sa première exposition, organisée dans la galerie prestigieuse d’Ambroise Vollard, est un succès, et aussi l’occasion pour les auteurs de la BD d’une critique de la critique empreinte d’humour. Mais Pablo connaît une nuit de crise, sa « nuit de Mai » à lui, qui le pousse à renier sa peinture première et à chercher sa voie ailleurs. « C’est ça que je veux peindre : la vérité pourrie sous les habits de fête. » Une nouvelle orientation qui n’est pas du goût de ses premiers protecteurs. C’est Max Jacob, subjugué par son autoportrait lors de l’exposition, qui lui viendra alors en aide.
Birmant et Oubrerie organise le scénario sur le mode du montage alterné, s’intéressant tour à tour aux avatars de Pablo et aux aventures de Fernande, qui ne se connaissent pas encore. Il se cherche tandis qu’elle s’égare comme modèle pour les peintres pompiers. Chacun peine à sa manière et fait son chemin. L’histoire de l’art attend leur rencontre…
J’ai beaucoup aimé la calligraphie qui donne au texte l’allure d’un cahier de souvenirs. Le dessin et les couleurs m’ont beaucoup plu aussi. J’apprécie ce souci du détail et certaines vignettes me rappellent un peu (en beaucoup plus réussi) ces petits tableaux « poulbots » que j’adorais dans mon enfance. Le cadre et les personnages m’intéressaient évidemment, et je dois dire que les auteurs ont l’art de choisir les détails et les épisodes qu’ils nous narrent. C’est une approche fort intéressante de ce milieu artistique, entre ateliers et alcôve, entre échecs et succès.
A suivre, le second tome, intitulé Apollinaire !
J’avais hésité avec le second tome … Puis l’avait reposé puisque je n’avais pas lu le premier, mais Apollinaire m’intéresse bien plus. 🙂
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Je le lis dans la semaine, je te dirai…
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