Réalisateur japonais talentueux né en 1962 à Tokyo, Kore-Eda Hirokazu s’inspire d’une histoire vraie pour nous proposer, avec « Nobody knows », un film sensible et terrifiant. Le film fut présenté en compétition officielle au Festival de Cannes en 2004. Le jeune Yuya Yagira, qui incarne Akira, le héros âgé d’une douzaine d’années, obtint d’ailleurs le prix d’interprétation masculine pour sa remarquable prestation. Dans l’histoire de Cannes, c’est le plus jeune comédien à avoir remporté ce prix.
A l’origine donc un fait divers sordide : 4 enfants abandonnés par leur mère 9 mois durant dans leur appartement du quartier de Sugamo à Toshima-KU…histoire marquée par le décès du plus jeune.
Le film s’ouvre sur l’arrivée de la famille Fukushima dans un nouvel appartement. Ils ont manifestement un souci pour se stabiliser quelque part. Accompagnée de son aîné, Akira, Keiko se présente aux voisins. Mère célibataire, elle a du mentir sur sa situation familiale pour obtenir ce logement. Personne ne doit savoir qu’à peine trentenaire elle est mère de 4 enfants de pères différents, pères qui sont tous aux abonnés absents. Les deux plus jeunes, Shigeru et Yuki, déménagent dans de grosses valises, tandis que Kyoko, qui doit avoir 10 ou 11 ans, doit attendre l’obscurité de la nuit profonde pour rejoindre la famille.
Keiko, jouée par You don c’était le premier rôle au cinéma, est une jeune femme volage, futile, immature, qui s’inquiète plus de sa vie amoureuse que de sa progéniture. A selfish woman ! Il est évident cependant qu’elle les aime…mais elle a souvent l’air d’être plutôt leur grande sœur.
Une fois la famille installée dans son nouveau chez elle, Keiko rappelle les nouvelles règles de vie dans cet appartement de Tokyo. Excepté Akira, qui a en charge les courses et la préparation des repas, ils ne doivent pas sortir, même sur le balcon. Personne ne doit savoir, pas même soupçonner leur existence ! Cela suppose qu’ils soient le plus silencieux possible, et surtout qu’ils soient déscolarisés, ce qui n’est pas du goût de Kyoko qui rêve de jouer du piano et de se rendre en classe…Shigeru regarde la télévision assis dans sa valise, Kyoko se charge de la machine à laver, Yuki dessine. La mère rentre souvent tard…il lui arrive même de s’absenter quelques jours. Puis quelques semaines. Elle nourrit ses rêves de midinette et croit encore au prince charmant, alors qu’Akira, particulièrement mature, ne croit plus au Père Noël, même lorsqu’elle assure qu’elle rentrera vite. Kyoko parle peu, mais n’en pense pas moins.
Habitués à ses absences, les enfants gèrent la situation assez paisiblement, respectant scrupuleusement les consignes. Mais cette fois, l’absence s’éternise et, contrairement à ce qu’elle avait promis, Keiko n’est pas de retour pour Noel. Akira se trouve confronté à des soucis nouveaux, des situations plus complexes : le manque d’argent, la fermeture des compteurs d’eau et d’électricité, la tentation du vol, les manques affectifs de chacun. C’est le début d’une lente dérive…malgré la présence de Saki, une lycéenne rencontrée dans un parc.
Le casting est magistral. Les 4 enfants imposent leur présence par des jeux de regards incroyables. Le film est peu bavard côté dialogues, mais le langage du corps et des yeux compense. J’ai visionné le film en VO sous titrée en anglais sans avoir l’impression d’en perdre une miette. C’est avec beaucoup de délicatesse et de finesse qu’Hirokazu aborde ces questions du parent démissionnaire, de l’indifférence des villes, de l’enfance brisée. Longtemps les enfants gardent un sens positif de l’existence multipliant les expériences de débrouillardise. C’est en ce sens un film initiatique qui retrace le passage de ces gosses à l’âge adulte, passage marqué par la transgression nécessaire. Aucun pathos ne plombe ce film. Il n’y a rien en trop, simplement une caméra qui sait s’attacher aux mimiques, aux détails signifiants comme les miettes d’un biscuit ou un frigo vide. C’est terrifiant, parfois triste, mais l’humour, l’amour que se portent ces enfants, confèrent au récit une dimension humaniste.
« Nobody knows » est à mon sens l’un de ces films incontournables qu’il convient d’avoir dans sa dévédéthèque !!!!
Je l’ai vu suite à ton article…. Je n’avais pas tout lu, juste le début et la fin, pour me garder la surprise. J’ai vraiment adoré… mais j’ai fini en larmes sur le canapé… Très beau film, très prenant, merci !
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J’ai partagé les mêmes kleenex!!!! C’est un grand moment en effet!
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